Législation relative à l'usage de caméras

L’utilisation de caméras par la police est réglementée en différents lieux en fonction d’un objectif propre. Dans cette rubrique, nous commentons brièvement quelques points d’attention importants concernant l’utilisation de caméras de surveillance telle que fixée dans la Loi sur la fonction de police (LFP) et la Loi caméras du 21 mars 2007.

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Surveillance par caméra dans le cadre de missions de police administrative et judiciaire

L’installation et l’utilisation de caméras sont réglementées en plusieurs endroits dans la LFP. Les articles 25/1 à 25/8 inclus réglementent l’utilisation visible de caméras. Les articles 46/2 à 46/14 inclus réglementent l’utilisation non visible de caméras. L’article 44/11/3decies réglemente par ailleurs le traitement des images et données recueillies au moyen de caméras dites « ANPR » (caméras intelligentes de reconnaissance automatique de plaques d'immatriculation ou « Automatic Number Plate Recognition ») et enregistrées dans des banques de données techniques.

La surveillance par caméra des bâtiments, bureaux de police et cellules de police (A.R. du 14-09-2007) relève de la LFP. Il en va de même de la surveillance par caméra du hall d’entrée ou de l’accueil du commissariat de police.

Utilisation de caméras à des fins policières non opérationnelles

Si la surveillance par caméra a (aussi) trait aux conditions et prestations de travail du personnel des services de police ou a un impact sur ces conditions et prestations, le RGPD et la LPD trouvent (également) application (Recommandation 06/2011 de l’APD).

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Quelle distinction est faite entre des caméras visibles et non visibles ?

Lorsque le citoyen est informé par des pictogrammes affichés le long des voies d’accès à la commune ou à l’entrée d’un espace public donné, il s’agit de caméras visibles. Il en va de même de l’utilisation de « bodycams » (caméras mobiles) puisque le citoyen est informé de leur utilisation par le fonctionnaire de police au moment du contact avec le citoyen. Cette information doit être fournie avant le début de l’utilisation de la caméra.

Les caméras non visibles sont des caméras qui sont utilisées à l’insu du citoyen. C’est par exemple le cas lors de l’utilisation de caméras (ANPR) dans ou sur des véhicules de police banalisés ou par des fonctionnaires de police en tenue civile.

Dans quels cas peut-on utiliser des caméras non visibles ?

La LFP ne définit pas le concept de « caméras non visibles ». Seules les circonstances et conditions de l’utilisation non visible de caméras sont réglementées de manière stricte et limitative. Il s’agit de situations spécifiques dans lesquelles il est dérogé (en partie) aux règles générales stipulées pour l’utilisation visible de caméras.

On distingue quatre catégories d’utilisations non visibles :

  1. 1. En raison de circonstances particulières, à savoir lors de grands rassemblements, en vue du recueil de l'information de police administrative concernant des personnes radicalisées ou des combattants terroristes, et sur des véhicules de police banalisés, pour la lecture automatique de plaques d'immatriculation, en vue de détecter des véhicules signalés.
  2. 2. Lors de la préparation d'actions de police judiciaire ou du maintien de l'ordre public lors de celles-ci.
  3. 3. Dans le cadre de missions spécialisées de protection de personnes.
  4. 4. Dans le cadre du transfert de personnes arrêtées ou détenues.
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Notification de l’utilisation de caméras non visibles au COC

Le COC est investi d’un pouvoir de contrôle spécial pour l’utilisation de caméras non visibles. Contrairement à la procédure applicable pour l’utilisation de caméras visibles, la décision d’autoriser ou de prolonger l’utilisation de caméras non visibles doit être notifiée au COC.

La notification ou communication s’applique uniquement pour les missions de police administrative. Il n’y a pas d’obligation de notification lorsqu’une caméra non visible est utilisée sous l’autorité d’un magistrat (exercice de la fonction de police judiciaire).

Cette obligation de déclaration se fonde sur un motif spécifique : le COC doit pouvoir examiner si la décision d’utiliser une caméra non visible, la prolongation de son utilisation ou l’exécution de la décision est conforme aux conditions légales. Dans la négative, le COC pourra suspendre l’utilisation de la caméra non visible ou y mettre un terme, et/ou interdire l’exploitation des images.

Étant donné que le COC doit pouvoir examiner la légitimité de l’utilisation d’une caméra non visible et pouvoir le cas échéant suspendre l’utilisation des caméras non visibles ou y mettre un terme, il est indispensable que la notification coïncide avec la décision ou la prolongation et soit préalable à l’utilisation effective.

Téléchargez ici le formulaire de notification au COC et renvoyez le formulaire complété à l'Organe de contrôle par mail à l'adresse suivante: info(at)organedecontrole.be avec comme sujet : "Notification de l'usage de caméras non-visibles".

Pendant combien de temps les images peuvent-elles être conservées ?

Les images peuvent être conservées pour un délai maximal de 1 an. Hormis pour les banques de données techniques, la LFP ne précise pas sur quel support de données les images doivent précisément être enregistrées. Pour cette raison, il est indiqué que le service de police responsable indique dans le registre des traitements de données visé à l’article 55 de la LPD sur quel support de données les images seront enregistrées. Le COC doit pouvoir accéder à ce support de données.

Aucun délai de conservation légal n’a été fixé pour les lieux de détention du commissariat de police. Le COC est d’avis qu’un délai maximal de 3 mois se justifie (voir la Recommandation 06/11 de l’APD).

Une fois le délai de conservation maximal expiré, les images doivent être détruites.

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Accès aux images par la police

Les images sont accessibles aux services de police pendant 1 mois à compter de leur enregistrement, à condition de pouvoir prouver un intérêt opérationnel. Ensuite, les images ne sont plus accessibles qu’à des fins de police judiciaire et moyennant une autorisation du Procureur du Roi.

Registre relatif à l’utilisation de caméras

L’utilisation de caméras doit être consignée dans un registre local du service de police (responsable du traitement). La géolocalisation des caméras doit en outre être documentée dans le registre national. Le COC doit pouvoir accéder aux deux registres.

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Accès en temps réel, par la police, aux images provenant de caméras non policières

Les services de police ont aussi accès en temps réel aux images des caméras de surveillance qui sont installées et utilisées dans le cadre du champ d’application de la Loi caméras du 21 mars 2007. Il s’agit de caméras installées dans des lieux accessibles au public induisant un risque de sécurité particulier (gare ferroviaire, centrale nucléaire, etc.). Il s’agit donc de caméras qui sont installées et utilisées par le gestionnaire (responsable du traitement) de ce lieu accessible au public, et dont le service de police est également autorisé à visionner les images.

Pour pouvoir accéder en temps réel aux images, une convention doit être conclue avec le gestionnaire du lieu en question. Le service de police doit également établir lui-même une analyse d’impact et de risques.

Lorsque l’accès en temps réel aux images induit le traitement des images par le service de police, les règles de la loi sur la fonction de police trouvent application (voir l’A.R. du 6 décembre 2018).

Le citoyen a-t-il accès aux images des caméras ?

Les données à caractère personnel qui sont traitées dans le cadre de l’utilisation de caméras (non visibles) ne doivent pas nécessairement être enregistrées dans les banques de données policières. C’est uniquement le cas si les données sont pertinentes à des fins de police administrative ou judiciaire et remplissent les critères fixés pour l’enregistrement dans les banques de données policières susmentionnées, comme la BNG. Dans ce cas, le système de l’accès indirect trouvera application.

Si les images ne sont pas pertinentes à des fins de police administrative ou judiciaire, la LFP ne s’oppose pas à ce que la zone de police responsable organise un droit d’accès aux images. Le système d’accès prévu par la Loi caméras du 21 mars 2007 peut dans ce contexte servir de modèle. Le citoyen s’adresse donc dans un premier temps toujours directement au service de police concerné.

En ce qui concerne les images filmées durant la détention temporaire au commissariat, le COC prône un accès direct aux images, par analogie avec la Loi caméras du 21 mars 2007 (voir la Recommandation n° 06/2011 de l’APD en date du 6 juin 2011).

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